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L’idée
Le Tour de France est née suite à l’invention du tandem par un Jean Pierre Anquetil et un groupe de Scouts de France avec lequel j’ai fait 700 Km en tandem dans le massif Central au mois de juillet 1984. Je n’ai pas réussi à réunir tous les atouts de mon côté, ni en 1985, ni en 1986, mais j’ai tout fait pour le Tour de France puisse se réaliser en 1987.
Le départ
Nous avons démarré le 1er juillet 1987 devant la mairie de Caen en présence d’un de ses représentants, de quelques journalistes et des amis venus pour nous encourager.
J’avais trois équipiers, Raphaël avec moi sur le tandem, Frédéric, lui, conduisait le camion et Nicolas sur un autre vélo à côté de nous.
Le 1er jour nous avons fait une étape de 100 Km. La matinée s’est très bien passée, mais l’après-midi nous avons eu quelques problèmes techniques, ce qui nous a un peu retardés. Le soir nous étions très fatigués car rouler pour un but précis est autre chose que de s’entraîner.
Le lendemain, nous avons repris le chemin en direction de Rouen Beauvais. Vers midi des petits problèmes ont commencé sur le tandem. Il faut dire qu’il a été fabriqué artisanalement et la plupart des pièces installées dessus proviennent de récupération.
Déjà la galère
A trois kilomètres avant l’étape de midi, une des manettes avec lesquelles je pédalais s’est cassée et en plus de ça une des chaînes n’arrêtait pas de sauter, ce qui nous faisait perdre beaucoup de temps.
Heureusement, nous avions une grande descente devant nous. Après le repas, le tandem ne voulait plus bouger, les chaînes ne restaient plus à leur place. Nous avons trouvé un réparateur dans le village où nous étions mais il n’avait pas de temps à nous consacrer et comme nous n’étions pas loin de Gourney en Bray, nous avons tout mis dans le camion et sommes partis dans cette direction. Le réparateur de Gourney en Bray a essayé de faire quelque chose mais c’était plus ou moins peine perdue et donc du temps perdu ! Il nous a seulement soudé les manettes mais rien pour les chaînes et de plus n’a pas arrêté de nous décourager et de nous conseiller de rentrer sagement chacun chez soi.
Personne n’avait envie de l’écouter. Nous n’avions pas envie d’abandonner surtout pas moi car j’ai mis deux ans à préparer ce projet et pour réunir tous les atouts de mon côté ; de plus, nous étions attendus dans beaucoup de mairies sur notre parcours. Nous sommes remontés dans le camion et avons pris la direction de Beauvais. Nous y sommes arrivés le soir pour aller dormir dans un camping situé sur les hauteurs de Beauvais, en face de la cathédrale tout éclairée. C’est à ce moment là que j’ai demandé une aide au ciel afin qu’il nous aide à trouver la personne susceptible de nous dépanner.
Le lendemain, après avoir rangé le matériel, nous sommes partis en ville à la recherche d’un mécanicien. Le premier ne pouvait rien faire avant quatre jours, le deuxième n’était pas très bricoleur, le troisième enfin a bien voulu essayer de faire quelque chose. Tout ce qu’il y avait à faire c’était de souder un dérailleur sur le cadre afin de tendre la chaîne qui remonte vers les manettes que j’utilise, ce ne fut guère facile car les pièces qu’il nous fallait ne sont plus guère utilisées pour les vélos d’aujourd’hui.
Vers midi, le tandem était en état de marche. Nous avons repris la route en direction de Soissons.
La route continue
Jusqu’à maintenant seul Raphaël avait pédalé et 10 Km après Beauvais, Frédéric pris le relais. Cela se passait maintenant très bien enfin mieux car si les chaînes ne sautaient plus c’était au tour des vitesses de ne plus fonctionner comme il fallait. Il a fallu beaucoup de patience, de la part des équipiers surtout car moi, malgré l’état du tandem dont j’avais conscience, j’étais heureux. Je faisais enfin mon tour de France et surtout je voulais prouver aux autres que j’étais capable de faire du vélo comme tout le monde même sans avoir l’usage de mes jambes.
L’après-midi, en montant une côte assez raide, nous avons perdu l’équilibre et ce fut notre première chute. Rien de grave heureusement et la petite douleur que j’en ressentis n’allait pas m’arrêter dans mon élan.
Raphaël et Nicolas nous suivaient dans un camion prêté gracieusement par TRANSAM, société de location parisienne. Or, nous prîmes deux chemins différents et nous trouvâmes, mon compagnon et moi, privés de nourriture pendant deux bonnes heures. Arrivés le soir à Soisson nous sommes allés dormir dans un camping. Après avoir tout installé et en faisant ma toilette, je me suis rendu compte que j’avais un hématome au niveau des fesses. Ce n’était pas l’inconfort de mon installation sur le tandem qui l’avait provoqué mais une chute faite le premier soir sur les palettes de mon fauteuil en voulant descendre sur le matelas gonflable. Ce n’était pas de ma faute car la douche très chaude m’avait trop détendu. Mais le plus important dans l’immédiat était de faire un gros “dodo” et la fatigue l’emportant sur les soucis je me suis réveillé le lendemain sans avoir vu passer la nuit.
Visite aux urgences
Le quatrième jour, en quittant Soissons, j’ai fait un bref arrêt aux urgences de l’hôpital pour me faire faire un pansement et pour avoir l’avis d’un médecin. Celui-ci ma conseillé de ne pas trop m’asseoir et de faire très attention. L’infirmière, apprenant ce que je faisais, ne me fit pas payer. Les équipiers étaient inquiets sur mon sort et ne savaient pas vraiment ce que j’avais. Quant à moi, il était hors de question d’abandonner, malgré la crainte que cet hématome puisse se transformer en escarre ce qui m’aurait contraint alors de m’allonger pendant plusieurs jours, voire des semaines.
Nous avons repris la route en direction de Châlons sur Marne où nous étions attendus à la Mairie.
L’accueil
Pendant la préparation de ce Tour de France, j’avais adressé une lettre à toutes les Mairies des villes qui seraient nos étapes leur demandant de nous accueillir et de nous loger. La réponse en général positive me toucha beaucoup car je craignais fort le contraire. Après une journée chaude et dure, nous sommes arrivés vers 18 heures à la Mairie où nous avons été très bien accueillis et logés gracieusement.
Ce soir-là, nous étions très fatigués, Raphaël était presque cuit, je veux dire brûlé par le soleil, malgré crème de haute protection ! au point de se demander s’il allait pouvoir continuer à pédaler.
Au matin du cinquième jour, le soleil était au rendez-vous avec un petit vent frais qui a encouragé Raphaël à pédaler dans la matinée.
Tout le monde était prêt à partir, et nous fûmes même accompagnés par Francis l’aubergiste pendant une dizaine de kilomètres. Un jeune Hollandais fit également route avec nous en vélo. La route était très belle, quelques petites côtes mais pas très dures. Francis est resté avec nous jusqu’à midi, nous avions déjà parcouru 55 kilomètres mais il ne fallait pas traîner ce jour là car l’étape suivante était encore très loin.
Après le repas de midi, nous avons dit adieu à Francis. Frédéric était avec moi sur le tandem, mais en fin d’après-midi il était crevé. Raphaël a pris son relais et s’ajoutant au retard que nous avions déjà il y eut encore quelques problèmes techniques. Nous arrivâmes à Chaumont à 20h30. Nous y avons été accueillis par quelques adjoints et conseillers municipaux ainsi que par le directeur du foyer des jeunes travailleurs où la réception avait lieu. La journée avait été très dure, nous avions pédalé pendant 135 Kilomètres et n’étions guère couchés avant minuit.
La fatigue s’installe
Malgré le manque de sommeil, nous étions, le lendemain, prêts à repartir à 9 heures. Il avait fait très chaud la nuit et pour se protéger des moustiques on ne pouvait même pas ouvrir la fenêtre. Pour ma part, je n’ai guère pu dormir à cause de la chaleur et de l’énervement. Raphaël non plus ne pouvait trouver une bonne position pour se détendre à cause de toutes ses brûlures qui ne faisaient qu’empirer. Frédéric ayant un robinet qui coulait dans sa chambre cela empêcha ce pauvre Nicolas de dormir !
Une personnalité de la Mairie de Chaumont nous a accompagnés lors du départ et le directeur du foyer des jeunes travailleurs nous a donné des provisions pour au moins trois jours. Nous avions hâte d’arriver à Dijon, notre sixième étape, où une journée de repos était prévue au programme.
La matinée se passa bien jusqu’à l’arrivée en bas du plateau de Langres. La côte était en effet tellement dure que nous étions éreintés. Les cyclotouristes la grimpaient en marchant à côté de leurs vélos. Nous n’avions qu’un seul moyen d’y parvenir c’était de nous attacher au camion. Ce que nous fîmes et cela se passa très bien.
L’après-midi, nous avions tout notre temps car nous avions fait le maximum avant de nous arrêter pour manger. Nous sommes arrivés à Dijon vers 18 heures et arrivés devant la mairie il s’est mis à pleuvoir des cordes. Monsieur le premier adjoint nous accueillit chaleureusement et nous conduisit ensuite au centre International des rencontres où nous étions logés et nourris toujours gracieusement.
Première grâce matinée
Le matin du septième jour, le réveil fut tardif car c’était jour de repos, ce dont nous avions tous grand besoin car nous étions épuisés mais c’est normal de l’être les premiers jours qui sont une sorte de rodage surtout sur un terrain plus que vallonné ! Nous avons profité de ce jour de repos pour visiter Dijon où nous avons rencontré un groupe de jeunes Italiens très étonnés par notre randonnée, nous traitant même de fous. Nous en avons profité également pour des détails pratiques et matériels : blanchir notre linge par exemple !
Et ça continue
Après une bonne journée et deux bonnes nuits de repos, nous avons repris la route en direction de Lyon. Nous comptions deux jours pour nous y rendre en évitant, bien sûr, les grands axes.
Au départ de Dijon, nous avons traversé le centre ville, au milieu d’une foule de curieux. Un grand “boum” provoqué par une voiture qui rentrait dans une autre nous fit sursauter. Le chauffeur fasciné par notre équipée ne regardait plus que nous et oubliait qu’il était au volant ! ce qui nous a fait tordre de rire. Mais nous avions hâte de quitter la ville, ce que nous fîmes rapidement.
La matinée s’est très bien déroulée, il ne faisait pas beau et l’après-midi nous avons été arrosés par de fortes pluies, de la grêle même. Le soir nous nous sommes arrêtés dans un camping, en pleine campagne, au bord dune rivière car il n’y avait pas d’étape prévue.
Dormir dans un camping nous obligeait à monter la tente, préparer le dîner, gonfler les matelas pneumatiques et surtout supporter les moustiques.
Après une longue nuit nous sommes repartis en direction de Lyon. Heureusement le temps s’est éclaircit à nouveau. Le paysage n’était plus du tout le même et après les grandes plaines s’étendant à perte de vue, c’était la montagne. Un tel paysage me faisait oublier ma fatigue et me rappelait énormément mon pays, le Liban.
Lyon
Nous sommes arrivés à Lyon un peu avant le rendez-vous, ce qui nous a permis de nous détendre un peu sous le soleil magnifique.
Vers 18h30, nous avons été accueillis à l’hôtel de ville par la deuxième adjointe au maire de Lyon en présence des scouts de France (groupe de Lyon), des amis à moi et quelques journalistes. Puis nous avons été conduits jusqu’à l’endroit où nous avons été logés par les soins de la mairie, dans une école pour enfants abandonnés, qui est superbe, calme et avec télévision en plus !
Le départ de Frédéric
Après notre étape à Lyon, j’avais prévu trois jours pour aller jusqu’à Nîmes, pensant faire un peu de montagne mais les vitesses ne marchaient pas bien. Impossible d’avoir la grande vitesse et pour la moyenne c’était juste. La première matinée s’est très bien passée mais l’après-midi, nous nous sommes perdus. Frédéric et moi d’un côté sur le tandem, le camion d’un autre. Frédéric était très énervé car il devait retourner à Lyon prendre le train pour Paris et ne voulait en aucun cas le rater. Enfin, au bout d’une après-midi de recherche et donc perdue, nous nous sommes retrouvés. Ouf ! Pendant que Nicolas conduisait Frédéric à la gare, Raphaël et moi poursuivions notre chemin. Nicolas nous rejoignit vers 21 heures sans nous perdre cette fois-ci. Il nous fallait encore deux jours pour arriver à Nîmes et il n’y eut pas de problème si ce n’est une grande chaleur.
Le sud
Nous sommes arrivés à Nîmes à l’heure prévue. Après réception à la mairie, nous avons été conduits au Centre qui nous hébergeait. Après une courte nuit, nous sommes repartis en direction de Sète, il faisait très beau. Le paysage avait encore changé. C’était maintenant la Méditerranée que j’étais si heureux de retrouver !
L’arrivée de Sophie et de Christophe
A Sète, comme d’habitude, nous avons eu un très bon accueil à la mairie. Nous sommes allées après nous installer dans le camping municipal. C’était la veille du 14 juillet et nous avions prévu de faire aussi la fête car le lendemain était également “férié” pour nous. Le 13 juillet, tandis que nous dressions la tente, le gardien du camping vint nous avertir que les nouveaux équipiers, Christophe et Sophie, avaient appelé pour nous prévenir de leur arrivée en gare de Sète à 4 heures du matin le 14 juillet !
L’arrivée de ces nouveaux équipiers prévus au programme soulagea énormément Raphaël qui fut le seul à pédaler pendant trois jours avec moi. Nicolas, lui, s’occupait de l’intendance et de la cuisine, ce qu’il faisait à merveille !
Après une bonne journée de détente et de baignade dans la Méditerranée, nous sommes partis de Sète le 15 juillet au matin en direction de Toulouse. Nous sommes passés par Carcassonne et Mirepoix . Au lieu de trois jours planifiés pour faire Sète-Toulouse, nous aurions pu prévoir deux jours seulement.
Je fus étonné, lors de cette étape, de trouver tant de pluie et dorage à Carcassonne, car je m’imaginais qu’il n’y avait qu’en Normandie que nous connaissions la pluie et la grêle !
Merci Sophie
Les nouveaux équipiers s’adaptèrent très bien et très vite à notre rythme et le voyage se déroula sans problème. La seule chose qui changea ce fut la cuisine. Nous avions en effet une cuisinière hors pair en Sophie et à la qualité s’ajoutait la variété. Nicolas fut donc remplacé dans ses fonctions d’alors et se mit à pédaler 50 kilomètres avant Toulouse. L’arrivée à Toulouse se passa très bien et nous étions en avance sur l’horaire prévu malgré le mauvais temps. Nous avons été reçus à la mairie par une adjointe au maire et puis logés dans un hôtel aux frais de la municipalité.
J’ai retrouvé à Toulouse des cousins de ma mère que je n’avais jamais vue sauf en photo et ce furent des retrouvailles émouvantes.
Nous continuâmes notre chemin en direction de Condom sans Raphaël car celui-ci avait dû abandonner là son périple.
Dommage
Il y eut un quiproquo à ce moment là. En effet un groupe de cyclistes condomois prévenus de notre arrivée voulue venir à notre rencontre sur la route d’Auch tandis que nous étions dans la vallée du Gers ! Quel dommage, mais la beauté impressionnante du site nous fit oublier cet incident qui nous avait vraiment navré.
A Condom, un adjoint au maire nous a reçus dans l’un des restaurants de la ville et le repas fut excellent et très gai. Après nous sommes allés dormir dans un local que la mairie avait mis à notre disposition.
Le vent de face nous poursuit
J’avais prévu de faire Condom-Bordeaux mais personne ne nous attendait à cette étape, toute l’équipe a décidé d’éviter la capitale du sud-ouest ce qui nous a conduit tout simplement en plein coeur des Landes. Il faisait un temps à ne pas mettre un chien dehors, nous avion toujours le vent de face et il tombait une pluie battante.
Le soir, nous nous sommes installés dans le seul camping de la région. La journée avait été très dure car nous avions pédalé 150 kilomètres par un temps épouvantable ce qui n’était pas pour nous faciliter la tâche. Il a plu à verse toute la nuit. Le lendemain nous avons continué notre route en direction de Royan. Le temps s’est amélioré et la route était meilleure.
Nous sommes arrivés à Lamarque, vers 13 h 30, après un repas froid et rapide, nous avons pris le bac pour traverser la Gironde pour descendre à Blaye.
Nous avons suivi la Gironde jusqu’à Royan où nous sommes arrivés vers 20 h 30 devant la mairie puis nous avons été escortés par deux gendarmes jusqu’au centre équestre de la ville où se déroulait le Jumping international afin d’y être reçu par Monsieur le Député Maire de Royan. Il y a eu un cocktail en notre honneur et nous avons ensuite été accueillis dans le camping municipal gratuitement.
Du repos !
Nous étions très fatigués en arrivant à Royan, moi surtout, je n’en pouvais plus et souffrais affreusement du dos car le siège du tandem n’était pas prévu pour les longues distances, il y avait également les douleurs musculaires et l’hématome prenait doucement mais sûrement l’allure d’un escarre que je m’efforçais de nettoyer très souvent, ce qui était mon seul souci. Le moral, malgré tout, était au beau fixe.
Nous avions prévu de nous arrêter une journée à Royan et quelle ne fut pas ma surprise de voir arriver un de mes amis avec son épouse pour nous inviter à passer la journée dans leur maison au bord de la mer. Quel bonheur de déjeuner et dîner autour dune table avec nappe et couverts, joliment dressée. Nous avons même été blanchis par la même occasion. Un peu de confort de temps en temps cela fait du bien ! La journée était vraiment très belle !
Puis nous avons dû quitter ce bel endroit pour nous diriger vers Luçon. Il ne faisait pas très beau et il y avait beaucoup de brouillard. Une fois de plus nous avons perdu le camion vers midi l’heure du déjeuner comme par hasard.
Aie ! mon dos
Nous sommes arrivés, comme prévu, à Luçon dans la soirée. Nous y avons été accueillis à la mairie par des adjoints et des conseillers municipaux et logés dans un petit hôtel. Mais le soir, en me couchant, j’eus beaucoup de fièvre causée par mon début d’escarre ou une infection urinaire, ou la fatigue du dos. Quelques comprimés mont fait de l’effet heureusement. Le pauvre Nicolas a voulu aller faire un tour en ville mais à son retour l’hôtel était fermé et comme il ne lui a pas été possible d’y rentrer, il ne lui restait plus qu’à dormir dans le camion. Au réveil je me portais beaucoup mieux, tout le monde aussi se portait mieux ou presque, Nicolas pas vraiment !
Nous étions le 23 juillet, le temps passe si vite ! Il ne nous restait plus que quelques jours pour arriver à Paris.
Nous avons quitter Luçon pour aller en direction de Nantes, notre ville étape. Nous y sommes arrivés à l’heure prévue et avons été reçus à la mairie par une conseillère municipale. Nous avons été hébergés par des amis de Sophie qui habitent à 35 km de Nantes. Nous nous y sommes rendus en camion cette fois. Nous sommes repartis de Nantes le lendemain vers Rennes. Le temps s’améliorait par rapport aux jours précédents. Nous avons eu quelques problèmes techniques pendant le trajet. Comme toujours ce genre de problème arrive au mauvais moment, ce qui nous a retardé de 20 minutes sur notre horaire. Nous étions attendus à la mairie de Rennes par Monsieur le Député Maire qui malgré notre retard, nous a fort bien reçu. Un des adjoints était présent ainsi que quelques cousins à moi. Après la réception de la mairie, nous sommes allés dîner dans le restaurant que tient mon cousin et ensuite dormir dans l’auberge de jeunesse aux frais de la municipalité.
Raphaël, qui nous avait quitté à Toulouse, nous fit la joie de revenir.
Paris est presque à l’horizon
Le lendemain matin, nous avons pris la direction de Mayenne. Pas de problème. L’après-midi, un groupe de cyclistes mayennais et des cyclistes d’Ernée sont venus nous accueillir à une vingtaine de kilomètres de Mayenne. Un peu avant d’arriver en ville les vitesses du tandem ne fonctionnaient presque plus.
Nous étions à 18 h devant la mairie où Monsieur le Maire, des représentants de la ville et quelques-uns uns de mes amis nous recevaient. Puis nous sommes allés dans le centre où se trouvait notre logement toujours offert par la mairie.
Raphaël et Christophe sont allés, accompagnés par quelques cyclotouristes, changer le dérailleur et faire réparer les vitesses chez un mécanicien qui s’est montré généreux en nous offrant la réparation ou presque.
Après le repas nous sommes allés prendre un verre chez des amis de Sophie qui l’ont hébergée car notre logement était réservé aux hommes.
Retour des côtes
Quelques cyclistes nous ont escortés, lors de notre départ, pendant un petit moment. La journée se passa bien si ce n’est qu’arrivé dans le Perche (Orne) nous y avons trouvé beaucoup de côtes, presque des montagnettes !
Nous sommes arrivés à la mairie de Mortagne au Perche vers 18 h 30 où nous avons été accueillis par Monsieur le Maire et un de ses adjoints dans un C.A.T. pour épileptiques dont le maire est le directeur. Ce fut une étape très intéressante car nous y avons appris beaucoup de choses sur l’épilepsie.
Après Mortagne, nous sommes partis en direction de Rambouillet. Quitter le Perche n’était pas facile. Il pleuvait, ça montait, ça descendait aussi et les vitesses ne changeaient plus malgré le nouveau dérailleur que nous venions de faire poser. Nous avons eu de la bruine tout au long de la journée.
Unique crevaison du tour
Le lendemain matin, Sophie nous a quittés pour aller prendre l’avion le soir même pour le Brésil ! Elle nous a accompagnés jusqu’au dernier moment. En fin de matinée la roue arrière a crevé. Nous avons passé beaucoup de temps à la réparer d’abord parce qu’il y a beaucoup de soudures sur le tandem et puis par manque d’habitude !
L’après-midi nous avons affronté une superbe côte aux alentours de Chevreuse et quand nous sommes arrivés dans la proche banlieue de Paris, nous ne savions plus quelle route prendre. Nous avons essayé plusieurs chemins mais à chaque fois nous retombions sur une route nationale à quatre voies ou sur une autoroute, ce qui nous a beaucoup retardé. Nous étions attendus à la porte de Saint Cloud par une de mes amis représentant la mairie de Paris et pour cette raison nous ne pouvions plus nous permettre de perdre du temps aussi à contre coeur et parce que nous ne pouvions faire autrement, nous avons pris le camion car la route nationale qui va jusqu’au Pont de Sèvres est à deux voies et strictement interdite aux vélos, la distance étant à peu près de 6 kilomètres dont 3 à 4 kilomètres de fortes descentes. C’est le résultat d’un périple préparé et réalisé avec de petits moyens.
Enfin Paris
Au Pont de Sèvres, nous avons repris le tandem, nous sommes arrivés à la Porte de Saint Cloud vers 15 h 15 où nous étions attendus par cet ami et deux policiers de la route de la police municipale de Paris dont l’un deux venait de faire le tour de l’Ile de France avec des “non-voyants”.
Nous sommes restés immobilisés un petit moment à la Porte de Saint Cloud car l’escorte de Madame Thatcher qui était en visite ce jour là à Paris, empruntait le même trajet que nous. Mais dès le passage de la représentante de sa Majesté Royale, nous sommes repartis en direction de Paris. Quelle joie de traverser Paris escortés par deux policiers, quelle ivresse de griller les feux rouges de la capitale sans avoir la crainte d’être poursuivi. Je crois que cet instant fut un des plus beaux moments de ce tour de France.
Réception à l’Hôtel de ville
Après cet instant grisant, nous sommes arrivés à l’hôtel de ville où nous étions reçus par Monsieur Jean Philippe Hubin, conseiller du 7e arrondissement et représentant de Monsieur Chirac. Il y avait aussi l’Amiral Bonnavita, Président du Comité National de liaison pour les handicapés, quelques journalistes, des amis et ma femme.
Pendant la réception, Monsieur Hubin ma remis la médaille d’argent de la ville de Paris, accompagnée d’un diplôme signé par Monsieur Chirac.
Après tous ces bons moments, nous avons pris le train et sommes repartis en Normandie laissant tout derrière nous, tandis que Christophe, le parisien de l’équipe, était chargé de rendre le camion à la Tran Am, la société qui nous l’avait prêté.
Le retour
De retour en Normandie, le médecin est venu examiner mon escarre, il n’était guère optimiste, ma femme non plus (elle est infirmière) mais moi je l’étais, j’étais sûr que ça cicatriserait très vite. Le pire était que ma petite fille âgée de 10 mois ne me reconnaissant pas, ne voulait plus venir dans mes bras. Ca m’inquiétait bien plus que l’escarre qui fut guéri après 3 semaines allongées.
Conclusion
Le Tour de France, malgré la fatigue, s’est très bien déroulé, il y a eu des hauts et des bas mais l’essentiel est d’avoir réussi à surmonter toutes les difficultés, les moments durs, d’énervement, de fatigue, de faiblesse.
J’ai fait ce Tour de France afin de réaliser un vieux rêve, afin de prouver que faire du vélo avec les bras est possible, afin de montrer que le handicap n’est pas un barrage infranchissable et cette épreuve physique et morale ma aidé à comprendre beaucoup de choses de la vie.
Ce Tour de France a été préparé par moi-même. J’ai tout organiser pendant trois mois. Ce ne fut pas facile de trouver le financement et surtout les équipiers à qui je tire mon chapeau car sans eux rien de tout cela n’aurait été possible et je pouvais quand même pas pédaler tout seul. Quand on est inconnu comme je le suis, il est difficile de faire croire à son projet et c’est grâce à l’intervention de quelques amis que quelques sociétés ont accepté de me sponsoriser, entre autres : Jeunesse et Sports, le Comité National de liaison pour handicapés.
J’avais besoin de récupérer et j’ai dormi sans interruption pendant 3 jours et 3 nuits mais après, j’ai commencé à m’ennuyer. Pendant le tour de France tout le monde regardait le tandem avec étonnement puis ensuite avec amusement. Il y avait beaucoup d’éclat de rire sur notre passage et nous même étions gagnés par cette gaieté. La plupart de nos spectateurs avaient compris mon handicap et ne s’étonnaient donc pas de me voir pédaler avec les mains.
Remerciements
Il est également important de souligner la qualité de l’accueil de toutes les mairies où nous avons été reçus et la présence de la presse locale. Je dois encore dire merci à tous ceux qui m’ont encouragé, merci à mes équipiers et enfin merci à ma femme de m’avoir supporté pendant la préparation de ce tour.
L’AVENTURE C’EST QUELQUE CHOSE QUI COULE DANS LE SANG, C’EST AUSSI QUELQUE CHOSE QUI NAIT AVEC L’HOMME.